S'il est des espaces de connivence, il en est d'autres qui obéissent à des stratégies, ou plus exactement peut-être, à des tactiques de diversions.
La collection du 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine (Fonds régional d’art contemporain de Lorraine), par exemple, que l’ikob accueille à travers un choix d’œuvres significatif qui révèle son caractère singulier et stratégique. En quelques mots, il s’agit ici d’inventer des points de vue inversés, de célébrer l’invisibilité, la sensorialité, de revendiquer la disparition...
En ce sens, IN/VISIBLE reflète la tendance actuelle du monde de l’art contemporain qui consiste à trouver, ou reformuler, des formes d’art alternatives à la pression du marché de l’art et connectées à une pensée artistique fondamentale dont il semble que nous ayons quelque peu perdu le fil. Dans une telle perspective, l’institution cesse d’être un lieu de célébration, de consécration, de légitimation et se mue en lieu d’expérimentation, en terrain de jeu, en champ ouvert à toutes les formes de manœuvres et d’opération critiques. Et pour citer Hubert Damish : « le temps est venu d’une utilisation ludique de l’institution qui correspondrait, en fait, à la pratique réelle et la plus constante de l’art moderne et contemporain ».
IN/VISIBLE est ainsi pour l’ikob à la fois l’occasion de rendre hommage à une collection des plus originales et engagées du paysage institutionnel de l’art contemporain et une manière, à peine détournée, de questionner son propre statut de musée et les limites de sa collection. Comme le dit si bien le « prélude » à la collection du Frac Lorraine, aujourd’hui composée d’un peu plus de 800 œuvres : « Si le Frac Lorraine collecte tous les ans des œuvres d’artistes de renommée nationale et internationale, cette démarche s’accompagne toutefois d’une réflexion sur l’acte même de collectionner. Il serait en effet réducteur de présenter cette collection sans préciser que depuis quelques années, le Frac Lorraine cherche à réfléchir sur les limites d’une collection, faisant ainsi écho aux moyens actuels de la création. Peut-on ignorer qu’une partie de l’art depuis les années 1960 est issue de la performance, que la proximité avec le cinéma est de plus en plus évidente. En posant ces préceptes, le Frac Lorraine en est venu tout naturellement à collectionner des propositions d’œuvres plutôt que leur réalisation tangible. Le plus souvent immatérielles (performances, protocoles d’artistes à réactiver) la collection s’est aussi ouverte aux autres disciplines (danse, cinéma). »